20 mai 2021

Éducation, les leçons d’une erreur

Beaucoup de nos élèves préfèrent ainsi s’abstenir de répondre ou de s’engager dans certaines tâches plutôt que de courir le risque de se tromper.

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Denis Peiron affirme dans La Croix la nécessité de l’erreur dans l’éducation. Un droit à la faute qui serait la condition même de l’apprentissage.

Lecture en 2 min.


L’erreur est humaine. Autrement dit universelle. Et pourtant, le droit à l’erreur, lui, ne s’applique pas de façon uniforme à la surface du globe. En la matière, la France a sans doute beaucoup à apprendre d’autres pays. L’un des exemples qui revient le plus souvent est celui des États-Unis, où les banquiers ont la réputation de prêter plus volontiers de l’argent à des créateurs d’entreprise qui ont déjà échoué une fois, en partant du principe qu’ils ne commettront pas une seconde fois les mêmes erreurs.

Notre école, elle aussi, gagnerait à s’inspirer de certaines de ses voisines. Car l’étude Pisa, qui compare les performances scolaires des jeunes de 15 ans au sein des pays de l’OCDE, met en lumière une forme d’inhibition très française : beaucoup de nos élèves préfèrent ainsi s’abstenir de répondre ou de s’engager dans certaines tâches plutôt que de courir le risque de se tromper.

Une « faute » lourde de culpabilité

À lui seul, le vocabulaire employé dans nos classes pour désigner les tentatives infructueuses en dit long sur notre rapport complexe, pour ne pas dire complexé, à l’erreur. Bien des fois, on préfère à ce mot celui de faute, moralement connoté et lourd de culpabilité. Or quel mal y a-t-il au juste à donner une fausse réponse, à aboutir à un résultat erroné ? Ne gagnerait-on pas à voir avant tout dans l’erreur un essai imparfait ?

Sauf s’il se complaît dans la paresse ou la mauvaise volonté, l’auteur d’une erreur ne mérite pas de condamnation mais plutôt un « try again ! », un encouragement, une invitation à recommencer, à faire mieux, pour reprendre la formule popularisée par les jeux vidéo. Mais cette bienveillance rime avec exigence : il ne s’agit pas seulement de tenter une nouvelle fois sa chance mais bien d’analyser ce qui nous a empêchés de répondre correctement à la question ou de trouver la solution à un problème.

L’erreur, condition même de l’apprentissage

Les neurosciences, qui ont le vent en poupe dans le domaine de l’éducation, le confirment. Se tromper – et surtout comprendre son erreur – constitue pour le spécialiste Stanislas Dehaene, président du conseil scientifique de l’éducation nationale, l’un des quatre piliers de l’apprentissage au côté de l’engagement, de l’attention et de la consolidation du savoir et des compétences. Mieux, affirme-t-il : l’erreur est la condition même de l’apprentissage.

De quoi inciter les enseignants à soigner la correction, à se montrer le plus précis possible dans les annotations, à prendre systématiquement le temps d’un échange lors de la restitution des contrôles. À rappeler aussi tout ce que l’erreur peut avoir de créatif. Combien d’œuvres marquantes sont nées d’un trait raté ou d’une tache, bien loin des intentions premières de l’artiste ? Combien de découvertes scientifiques trouvent leur origine dans une fausse manipulation ou une entorse involontaire au protocole ?

Réhabiliter l’erreur, c’est opérer une petite révolution scolaire. C’est repenser la notation, en faisant plus de place à ce que les pédagogues nomment l’évaluation « formative », une évaluation qui ne compte pas nécessairement dans la moyenne mais permet à l’élève de cerner ses forces, ses insuffisances, ses marges de progrès. À défaut, les notes sont trop souvent la source d’un stress qui, à forte dose, nous disent encore les neurosciences, exerce des effets néfastes sur l’attention, la concentration, la mémorisation. Une erreur dont on a encore beaucoup à apprendre.

Notes à l’école, faut-il tout changer ?

Alors que le nouveau bac fait la part belle au contrôle continu et que Parcoursup conditionne toujours l’affectation dans le supérieur, les notes continuent à soulever des problèmes d’équité. Faut-il tout changer dans le système de notation français ? Enquête dans trois établissements.

C’est l’histoire d’une note. Comment elle naît, comment elle est reçue, comment parfois elle pèse sur une trajectoire, voire scelle un destin… En cette matinée, au sein du très renommé lycée du Parc, à Lyon, flotte comme un parfum d’examen. Les sacs à dos qu’on entasse au pied de la paillasse pour s’éviter toute tentation de triche, le froissement des feuilles – dix au total – qu’on tourne fébrilement pour prendre connaissance du sujet, le crissement de la craie qui vient rappeler l’heure de fin du contrôle, heure couperet au-delà de laquelle toute rétention de copie vaudra retrait de points.

Tous les élèves de terminale qui ont choisi la physique-chimie comme enseignement de spécialité ont rendez-vous pour un devoir commun, dans un esprit proche du bac blanc. Particularité : chacun des trois professeurs de la discipline a conçu un exercice, soumis à ses collègues et éventuellement amendé, exercice qu’il corrigera lui-même sur l’ensemble des copies dans le but de lisser les différences de notation. Il est question du fonctionnement d’une pile nickel-zinc, de granulométrie appliquée à une poudre de cacao ou encore du jet-pack utilisé par un super-héros de bande dessinée pour se propulser dans les airs.

Au quatrième rang, Syrine, « stressée de nature », comme elle se décrit elle-même, affiche une relative sérénité. Pensionnaire de l’internat d’excellence, réservé à des élèves méritants issus de milieux modestes, cette jeune fille originaire de la banlieue lyonnaise bénéficie chaque soir jusqu’à 21 heures d’une étude encadrée par des professeurs ou des étudiants des grandes écoles. Au total, pour préparer ce devoir sur table, elle aura passé « une bonne dizaine d’heures » à potasser l’ensemble des chapitres abordés depuis le début de l’année.

En salle des profs, partage des copies

Syrine n’est pas la seule à s’être donné les moyens de décrocher une bonne note. Maia – 16,5 de moyenne au premier trimestre – a revu à fond son cours, ses méthodes, ses formules. Étienne, quant à lui, vise pour ce devoir une note « entre 12 et 14 », alors que sa moyenne en physique-chimie a grimpé de 10 à 12 entre le premier et le deuxième trimestre.

Le jeune homme, allure décontractée, fait partie de ces athlètes qui ont besoin de compétition pour donner le meilleur d’eux-mêmes dans la dernière ligne droite. Mais cela s’est révélé une erreur de stratégie, dans le contexte du Covid : quelques jours auparavant, le ministre de l’éducation Jean-Michel Blanquer a annoncé la suppression des épreuves de spécialité prévues mi-mars au profit d’un contrôle continu. La note sera donc de première importance…

« J’ai continué à noter comme je le faisais dans mon établissement précédent, moins coté. Personne ne m’a rien dit mais j’ai bien senti qu’il fallait que je rentre dans le rang » Laura Rea, enseignante de physique-chimie

La surveillance du contrôle terminée, tout juste le temps d’avaler un sandwich, les enseignants de physique-chimie se retrouvent dans leur « labo », un bureau réservé à leur discipline. Partage des copies en trois tas, qui circuleront de main en main.

Laura Rea confie sentir une fois de plus sur ses épaules « une grande responsabilité » au moment de se lancer dans la correction. Longtemps remplaçante, cette professeure a connu une quinzaine d’établissements de l’académie de Lyon, en ville, en banlieue, à la campagne, avant de pouvoir suspendre durablement sa blouse blanche au lycée du Parc. À chaque nouveau contexte, elle a dû adapter sa notation.

Une notation « centrale » dans son métier, « au point que chaque séquence de cours est conçue en fonction du contrôle à venir », dit-elle, prenant conscience de ce fait à regret. « Lorsque je suis arrivée ici, il y a sept ans, j’ai continué à noter comme je le faisais dans mon établissement précédent, moins coté. Du coup, mes classes affichaient un 14 de moyenne, contre 10 ou 11 chez mes collègues. Personne ne m’a rien dit mais j’ai bien senti qu’il fallait que je rentre dans le rang, relate-t-elle. J’avais la douloureuse impression que mon professionnalisme était remis en cause. »

Depuis, Laura Rea s’est approprié les usages de son établissement. Des usages qui cependant ont beaucoup évolué ces dernières années. Car la réforme du baccalauréat a introduit une large part de contrôle continu (10 % basé sur les bulletins trimestriels, 30 % sur des sortes de partiels durant les années de première et de terminale). Dans un système éducatif tout entier tourné vers le diplôme roi, ou ce qu’il conserve de symbolique, changer son mode d’attribution était la plus sûre façon de bousculer, en cascade, les pratiques. La crise sanitaire, en conduisant cette année comme l’an dernier à annuler tout ou partie des épreuves finales, n’a fait qu’accélérer le mouvement.

Comme d’autres établissements qualifiés d’« élitistes », le lycée du Parc, implanté dans un secteur privilégié de Lyon, avait pris l’habitude de noter sévèrement – ou de donner des devoirs plus exigeants – pour aiguillonner ses élèves et les amener à « surperformer » le jour des examens. « En physique-chimie, l’écart entre la moyenne de terminale et la note du bac pouvait atteindre les deux points. Il était souvent plus grand encore en maths », se souvient Laura Rea.

« Désormais, de manière plus systématique qu’avant, je revois mon barème quand je remarque que la moyenne d’un paquet de copies reste en deçà de 11/20 » Laura Rea

Mais continuer ainsi, avec les nouvelles conditions d’attribution du bac, aurait conduit dans cet établissement à une baisse du taux de réussite, jusqu’ici proche des 100 %, ainsi que du nombre de mentions, distinctions obtenues d’ordinaire par huit élèves sur dix. « Désormais, de manière plus systématique qu’avant, je revois mon barème quand je remarque que la moyenne d’un paquet de copies reste en deçà de 11/20. Je n’hésite plus, alors, à noter sur 21 ou sur 22. Et quand je sais qu’un élève traverse une période difficile, j’essaie de grappiller des points par ci, par là », confie Laura Rea, qui assume son côté « maternel ». « Un professeur, ce n’est pas une machine, ça note avec la tête et avec le cœur aussi ! », insiste-t-elle.

Au quart de point près ?

En bientôt trente ans de métier, son collègue Xavier Gouttefangeas avoue lui aussi avoir assoupli sa notation, quand bien même, par habitude, pour investir les marges de la copie, il continue de n’utiliser qu’une couleur à la symbolique agressive, une couleur formellement interdite aux élèves : le rouge. « Ici, l’élève a appliqué le bon raisonnement mais à une valeur qui n’était pas la bonne », dit-il en annotant le devoir d’Étienne. « Il y a neuf ans, à mon arrivée au lycée du Parc, je m’en serais sans doute tenu à un demi voire un quart de point », glisse-t-il, en accordant à l’élève trois quarts de point pour cette partie de l’exercice.

« En physique, on sait qu’on ne peut pas connaître la vraie valeur. Avec une copie, c’est la même chose… on essaie de s’approcher le plus possible de sa valeur » Xavier Gouttefangeas, enseignant de physique-chimie

Même dans les sciences supposées « exactes », l’évaluation implique une part de subjectivité, une part de biais. « En physique, on sait pertinemment qu’on ne peut pas connaître la vraie valeur. On s’appuie sur des modèles, des lois, pour calculer une valeur théorique, qui n’est toujours qu’une représentation de la réalité. Avec une copie, c’est la même chose… on essaie de s’approcher le plus possible de sa valeur », concède-t-il avec humilité.

L’enseignant s’est entendu avec ses deux collègues sur les principes de notation et la tolérance dans le cas où par exemple l’élève oublie – deux fois maximum – de préciser l’unité dans son résultat. Avant de se plonger dans la correction, il a aussi recherché dans son tas les copies d’élèves qui d’ordinaire obtiennent les meilleurs résultats afin de mieux étalonner les notes. Des élèves qui cette fois-ci n’ont pas réussi à avoir plus de quatre points sur cinq pour sa partie du devoir.

Quatre sur cinq, c’est précisément la note obtenue par Syrine à cet exercice de granulométrie. Un exercice en revanche bien vite corrigé sur la copie de Maia. « J’aurais pu réussir cet exercice mais j’ai à peine pu le commencer car j’avais passé trop de temps sur les autres », soupire-t-elle. « Ce 0,5 ne reflète pas ce que je sais ni ce que je sais faire », se console-t-elle, même si elle a conscience que la gestion du temps, lors d’un devoir sur table, est cruciale.

« Les notes sont la pire façon d’évaluer un élève, à l’exception de toutes les autres » Étienne, lycéen

Pour nos trois élèves, la remise des copies, une petite semaine après le contrôle, n’a rien de particulièrement réjouissant. Maia : 13/20. « Comme souvent, j’avais refait le devoir chez moi pour vérifier ce que je pensais avoir réussi ou raté. J’étais prête à recevoir une note nettement inférieure à celles que j’obtiens d’habitude. » Syrine : 14/20. « J’ai limité les dégâts, même si cela fait baisser ma moyenne de physique à 15,5… » Étienne : 9/20. « J’aurais pu mieux faire. » Expression employée par son professeur, à la remise des copies.

Étienne n’accorde pas une importance démesurée aux notes : « Les notes sont la pire façon d’évaluer un élève, à l’exception de toutes les autres », dit-il en détournant avec humour une citation de Churchill sur la démocratie. Son père, Emmanuel, est assez d’accord. « Je me fiche de la note. Ce qui m’importe, c’est l’appréciation qui l’accompagne et la compréhension de ce qui a conduit le correcteur à attribuer tel nombre de points », glisse cet ingénieur de formation, aujourd’hui avocat.

Mention ou pas, telle est la question

Emmanuel ne fait pas partie de ces parents qui guettent avec anxiété l’apparition de toute nouvelle note. Il demande à ses cinq enfants de donner « le maximum, en fonction de leurs capacités ». Mais cette fois, interrompant notre entretien, il demande à son fils de lui montrer sa copie afin de comprendre les raisons de ce 9/20 qui sonne comme une « déconvenue ».

Cas d’école : son fils a obtenu 1,75 à chacun des exercices notés sur cinq, deux évaluations en apparence identiques pour pointer des lacunes différentes. « Dans le premier cas, faute sans doute d’avoir lu l’énoncé avec attention, il répond juste à une question autre que celle posée, ce qui soulève un problème de méthode. Dans le second, il ne connaît suffisamment pas le cours », analyse-t-il en grimaçant à la lecture du commentaire de l’enseignant : « Des erreurs grossières pour un élève de terminale. »

Qu’adviendra-t-il, au juste, de la note obtenue à ce devoir commun ? Elle pèsera bien évidemment sur la moyenne trimestrielle de physique-chimie, avant de se diluer dans la moyenne générale. Faute d’épreuve finale, elle comptera aussi pour près de 10 % de la note de spécialité au baccalauréat, dans une discipline affectée d’un coefficient… 16 ! De quoi, le cas échéant, permettre ou empêcher l’obtention d’une mention.

Dans bien des cas, le parcours de la note s’arrête là, dérisoire jalon d’une scolarité ployant sous les chiffres. Dans d’autres, son influence s’inscrit dans le temps et prend un tour très concret, quand, aux portes des formations les plus prisées, quelques dixièmes de point servent à départager deux excellents candidats.

« Avec la pandémie, ce n’est pas le moment de rajouter de la pression » Laurent, père d’une lycéenne

Si Emmanuel ne s’alarme pas plus que ça, c’est que son petit dernier n’a pas choisi de poursuivre dans une formation qui sélectionne dès la sortie du lycée. Étienne veut « faire médecine ». Tout comme d’ailleurs sa camarade Maia, laquelle suit déjà des cours dans une « boîte à colle », un institut privé qui propose un entraînement aux étudiants et futurs étudiants en santé.

« Un 13/20, c’est clairement une mauvaise note selon les critères de Maia », relève son père, Laurent, qui s’emploie à dédramatiser. « Avec la pandémie, Maia ne peut plus pratiquer le karaté, qui contribuait tant à son équilibre, elle ne peut plus faire de fêtes avec ses amis. Ce n’est pas le moment de rajouter de la pression », glisse-t-il.

D’autant qu’à Lyon, les candidats issus de l’académie sont à peu près sûrs de pouvoir s’inscrire en première année de santé. Même avec une petite moyenne en physique, discipline présente à forte dose dans ce cursus. C’est après que les choses se corsent, puisque 10 % à peine peuvent poursuivre en deuxième année en médecine…

En tout cas, avec la réforme Parcoursup intervenue en 2017, toutes les formations de premier cycle, même à l’université, classent les candidats en fonction des notes de lycée et même parfois du rang dans la classe. Un classement synonyme de sélection pour les filières trop demandées, sans parler des formations ouvertement sélectives, les BTS, les écoles postbac ou encore les classes préparatoires, où les notes restent primordiales.

Parcoursup du combattant

Plus encore que les nouvelles modalités d’attribution du bac, ce sont les enjeux d’orientation vers le supérieur qui ont conduit le lycée du Parc à engager l’an dernier une réflexion en profondeur sur les pratiques de notation, avec une incitation à davantage de mansuétude.

« Les notes influent largement sur les possibilités d’études, et nous avons le devoir d’offrir à nos élèves les meilleures conditions d’accès au supérieur » Romuald Eyraud, proviseur adjoint du lycée du Parc

« Clairement, les notes n’ont plus rien d’un outil interne à l’établissement. Elles influent largement sur les possibilités d’études, et nous avons le devoir d’offrir à nos élèves les meilleures conditions d’accès au supérieur », argumente Romuald Eyraud, le proviseur adjoint du lycée du Parc.

Réunion après réunion, Mejda, la mère de Syrine, le constate : « Les parents se plaignent, répètent que leurs enfants sont sous-notés. » En même temps, la réputation du Parc n’est plus à faire. De quoi, espère-t-elle, faire monter un dossier dans la pile… Syrine, qui durant le confinement a peut-être trouvé sa vocation, « élaborer des vaccins », candidatera en tout cas dans plusieurs classes prépas scientifiques, y compris au lycée du Parc. « La moindre mauvaise note peut me coûter ma place dans une des formations visées », songe la jeune fille avec lucidité.

Car si les prépas accueillent un bachelier général sur dix, certaines jouent bien mieux que d’autres leur rôle de tremplin vers les grandes écoles les plus prestigieuses.

Une compétition internationale

C’est le cas des formations que propose le lycée du Parc, classé, insiste Romuald Eyraud, dans « le top 5 national », tout près des Henri-IV et Louis-le-Grand parisiens. L’an dernier, pour 700 places en première année, l’établissement a reçu 20 000 candidatures de toute la France et même de Chine, du Maghreb, de Biélorussie… « Chaque année, nous sommes contraints de refuser des jeunes gens d’un peu partout qui étaient premiers dans leur lycée », justifie Romuald Eyraud.

« L’essentiel de mes chances réside dans mes notes et les appréciations de mes enseignants » Syrine, lycéenne

Quelles chances pour Syrine dans cette vaste compétition, qui fige parfois les hiérarchies pour toute une carrière ? Quel espoir de rejoindre la « voie royale » ? Le proviseur adjoint n’en fait guère mystère : bien qu’excellente, une moyenne de 16/20 dans les matières scientifiques ne permet pas de prétendre à une prépa au lycée du Parc. « En revanche, Syrine n’aura aucun mal à rejoindre, si elle le veut, une prépa dans un autre bon lycée, qui lui permettra peut-être de décrocher une grande école », anticipe Romuald Eyraud.

Bûcheuse et opiniâtre, Syrine s’emploie déjà à rédiger avec application la mini-lettre de motivation qui accompagne chaque candidature sur Parcoursup. « L’essentiel de mes chances réside dans mes notes et les appréciations de mes enseignants, analyse-t-elle. Mais mes engagements extrascolaires, le fait par exemple d’avoir participé aux maraudes de l’Armée du salut, peuvent constituer un plus », espère-t-elle.

Pour aller plus loin

►Un livre

Les Notes. Secrets de fabrication

Le sociologue Pierre Merle analyse les multiples biais qui font des notes une mesure bien imparfaite du niveau scolaire des élèves. Des notes qui résultent d’un « bricolage », chaque enseignant leur assignant de multiples objectifs (prévenir le découragement des plus faibles, le relâchement des plus forts, limiter la contestations, etc.) et en tenant compte du contexte propre à leur discipline et à leur établissement. Le chercheur ouvre aussi des pistes pour une évaluation à ses yeux plus juste socialement.

PUF, 2007, 15 €

►Un podcast

L’école abuse-t-elle des notes ?

L’émission « Rue des écoles » sur France Culture (devenue « Être et savoir ») explore le lien qui existe entre toute pratique de notation et une certaine philosophie de l’enseignement et de la transmission.

Sur franceculture.fr (mots-clés : rue des ecoles notes) et sur les applications de podcasts

►Un mot

Docimologie

Du grec dokimé, épreuve, et logos, raison, discours. Le terme « docimologie », introduit au début des années 1920 par le psychologue Henri Piéron, désigne la science des examens, la science des notes. Ce courant d’études s’est employé à démontrer les lacunes des modes d’évaluation traditionnels et a accompagné l’essor de pédagogies alternatives.

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