14 mai 2013

Des groupes lucratifs peuvent-ils avoir un apport significatif à l’amélioration du système éducatif ?

nsvfEn France prévaut dans l’opinion publique l’idée que l’éducation – domaine noble – ne saurait être un domaine marchand et que tout investissement lucratif dans ce domaine est malvenu. On suppose que motivé par la recherche de profit, un acteur lucratif (une entreprise) ne peut pas délivrer une éducation de qualité. Et dans tous les cas, s’il le fait par miracle, il le réserve alors nécessairement à une minorité aisée de parents. Ce qui est un facteur aggravant. Notons au passage que, paradoxalement, cette défiance à l’égard du  secteur lucratif n’empêche pas les parents de consommer des cours de soutien à domicile en toute bonne conscience auprès d’entreprises lucratives de soutien scolaire.

Il est en tout cas indiscutable qu’en France, en 2013, les établissements supérieurs privés ont été massivement rachetés par des acteurs lucratifs, et en particulier par des fonds de pension. Ces derniers se tournent à présent avec gourmandise vers le secondaire. Alors que l’éducation publique ne parvient pas à se réformer,  dans peu de temps, de plus en plus de gens, se disent-il, seront prêts à payer cher pour que leur enfant ait une formation de qualité. D’autant que les établissements privés à but non lucratifs qui scolarisent actuellement 20% des enfants sont financièrement étouffés par des restrictions d’un autre âge pesant sur les financements publics qu’ils peuvent recevoir.

Dans ce contexte, pour nourrir la réflexion, nous vous proposons ici d’avoir un aperçu des tendances à l’œuvre aux Etats-Unis, de voir comment le secteur lucratif et non lucratif s’imbriquent pour tenter d’inventer de nouveaux financements et de nouvelles manières d’enseigner.

TEXTE :

NewSchools Venture Fund (http://www.newschools.org/)  est un acteur à but non lucratif qui canalise les financements philanthropiques en faveur des réseaux de Charter Schools (écoles publiques  américaines confiées pour leur gestion à des acteurs privés, et très libres dans leur ethos educatif et leurs méthodes de management et d’enseignement). NewSchools finance notamment les réseaux de Charter schools comme Aspire Public Schools, KIPP and Rocketship Education.

Il est symptomatique que cette « charity » vienne de décider de nouer un partenariat avec un acteur hautement lucratif : il s’agit d’un capital risqueur californien créé l’an dernier : Rethink education fund, spéalisé dans l’investissement dans les start-up dans le domaine de l’éducation. L’objectif  de Newschools est de trouver les financements avec plus de rapidité et de puissance que ce que la pure logique philanthropique permet. Ainsi Rethink Education versera une partie de ses profits à NewSchools.

NewSchools est un acteur de poids du système éducatif américain. Selon le New York Times du 30 avril 2013, il a investi plus de 260 millions de dollars ces 15 dernières années, à partir des donations de très grands donateurs comme la Fondation Broad, la Fondation Bill & Melinda Gates et la Fondation Walton. Cette fondation compte à son conseil d’administration des grands chefs d’entreprise de la Silicon Valley.

Rethink Education,  a été fondé quant à elle, parRichard Segal, un fundraiser bien connu qui a travaillé pour le président Obama, ainsi qu’un ancien directeur du Seavest Investment Group et un business angel  spécialisé dans des compagnies de technologies dans le domaine de l’éducation.

Pour les dirigeants de Rethink, l’éducation est un domaine qui manque cruellement de capitaux. Ce fonds a levé 40 millions de dollars et a investi dans 9 entreprises. L’intérêt des investisseurs pour le secteur de l’éducation a connu une montée en flèche récemment. Selon le « MoneyTreeReport », une analse des données de Thomson Reuter par PriceWaterhouse Coopers ainsi que le fonds Capital Risque Alliance, les investissements capital risque dans les entreprises d’éducation ont grossi de 80% depuis 2005 pour atteindre 632 millions de dollars l’an dernier. NewSchools a investi pour sa part dans des «  for-profit ventures », comme Engrade, et Grockit.

Certains critiques critiquent ces investissements, comme Diane Ravitch, l’historienne de l’éducation et la cofondatrice du «  Network for Public Education » qui s’oppose notamment au développement des charter schools. PourTed Mitchell, directeur général de NewSchools, les entreprises ont au contraire un rôle à jouer dans l’éducation publique. Les innovations financées par les investisseurs privés profiteront à tous, y compris aux plus pauvres. «  Nous cherchons à orienter les financements vers des investissements qui profiteront à tous, y compris aux plus pauvres, dit-il. Nous sommes persuadés que les entreprises à but lucratif ont simplement plus de capacité à faire cela que des structures désintéressées.”

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